Après
un retard très important pour reconnaître que
l’amiante était un problème majeur qu’il fallait
prendre à bras le corps,
l’Education Nationale a depuis 3 ans pris des
mesures pour qu’une information soit faite
auprès des personnels.
Mais il a fallu de longs mois, et la détermination des
organisations
syndicales, pour qu’une brochure informative sur
l’amiante soit
élaborée puis diffusée dans les
écoles et les établissements d’enseignement, sans que l’on soit certain encore
aujourd’hui
que tous les personnels en aient bien
été destinataires. Les
représentants du personnel en Comité Central
Hygiène et Sécurité,
au premier rang desquels la FSU, ont ensuite bataillé pour
qu’une
enquête d’exposition soit menée
auprès de l’ensemble des personnels : la demande que nous avons portée
était que tous
les personnels puissent être destinataires de cette
enquête avant
leur départ en retraite. Le choix gouvernemental a
été de cibler
les personnes « à
risque »en raison de leur profession
et lieu de travail, et de laisser aux autres la
responsabilité de
remplir d’eux mêmes un questionnaire sur les sites
académiques.
Nous le regrettons car nous savons que des collègues non
répertoriés
« à risque » ont
été victimes de l’amiante et en
subissent aujourd’hui les conséquences.
Aujourd’hui, les
premiers résultats pour l’enquête
menée auprès des personnels
nés en 1949 ou avant, montre la gravité de la
situation. Les
réponses donnent un peu plus de 2%
d’expositions fortes et
près de 7% d’expositions
intermédiaires: ce sont plusieurs centaines de collègues qui vont devoir être
suivis, et le ministère
organise maintenant le suivi des personnes concernées. Pour
autant
les collègues en exposition faible ne doivent pas
être négligés. Les enquêtes vont
se poursuivre pour
les personnels nés en 1950, 1951 etc. donc pendant
des années.
Cela suppose une organisation rigoureuse et des personnels :
il
faut faire vite !

Le
scandale de l‘amiante n’a pas fini de faire parler
de lui !
La FSU exige qu’une information plus offensive et plus
dynamique soit faite afin que tous les personnels soient bien
informés, et que
tous les collègues puissent remplir les questionnaires avant
de
partir en retraite. Elle exige qu’une recherche soit faite
pour les
personnels déjà partis en retraite et qui
n’ont pu être suivis.
Pour la FSU, minimiser les chiffres reviendrait à
évacuer le
problème et
« oublier » les
collègues qui sont victimes
de l’amiante, quel que soit leur nombre.

Les
personnels de l’éducation, qui subissent de
plein fouet les risques psychosociaux et les
TMS, peuvent
être aussi des victimes de l’amiante. Leur
employeur doit leur
accorder toute l’attention, le temps et les moyens
nécessaires.
Dans l’enseignement supérieur (qui n’est pas
concerné par ce
recensement) l’amiante est également présente
dans de nombreux
établissements des années 60, ce qui a conduit au
long chantier non
achevé de Jussieu et à des
décès de collègues dus à
l’amiante.


La
FSU rappelle qu’elle vient de signer
l’accord sur la
santé et la sécurité au travail et
qu’elle entend bien le faire
respecter. Cet accord contient un projet de suivi postprofessionnel
pour les risques différés qu’il
convient de traduire rapidement
dans les actes.

Article
publié dans Le Monde du 1 décembre 2009

L’éducation
nationale compte aussi ses victimes de l’amiante. Selon un premier
recensement réalisé par le ministère,
ils sont même nombreux à y
avoir été exposés.

Ce
document confidentiel, que Le Monde s’est
procuré, établit
un état des lieux à partir de 6 125
questionnaires remplis par des
agents nés en 1949 et avant.

Professeurs
ou techniciens, sept "répondants" sur dix sont
considérés
comme ayant été exposés. De
manière faible pour la majorité
d’entre eux (61 %), intermédiaire pour 6,8 % et forte pour
2,2 %.
Trois sur dix n’ont pas été exposés.

Si
le SNES (FSU), première organisation
représentative des enseignants
du secondaire, trouve ces chiffres
"inquiétants",
la directrice des ressources humaines du ministère appelle
à la
prudence.
"Il
s’agit d’une exposition faible,
relève
Josette
Théophile
.
Par
rapport aux ordres de grandeur que l’on trouve dans l’industrie, ces
résultats ne sont statistiquement pas
inquiétants. Lorsque c’est
nécessaire, un suivi médical sera
proposé, sans doute avec
scanner, et nous serons sûrement rassurés pour une
partie non
négligeable des agents."

Le docteur Lucien
Privet
, expert en santé du travail, souligne lui
aussi qu’
"il
ne s’agit pas d’expositions fortes".

Dans
un ministère qui emploie 1 million de personnes, ces
chiffres sont
attendus avec impatience. D’autant qu’avec l’explosion scolaire des
années 1970, beaucoup d’agents ont travaillé dans
des bâtiments où
l’amiante était présente, qui se sont souvent
vite dégradés. Si
l’amiante a été interdite en France
dès 1997, le ministère de
l’éducation nationale n’a lancé un "plan
d’action" qu’en
2005, avant de recenser les personnels à risques
à partir de 2007.

Ceux
qui ont été ciblés en
priorité sont les plus âgés,
nés en 1949
et avant. Les maladies liées à l’amiante, comme
les fibroses ou les
cancers, se déclarent longtemps après
l’exposition, il faut souvent
attendre plusieurs décennies.

"Sous-estimation"

Parmi
les agents qui ont répondu, certains ont reçu le
questionnaire
directement chez eux, parce que leur activité a
été jugée
particulièrement à risque : techniciens de
laboratoire, agents
techniques, professeurs de physique-chimie ou d’éducation
physique
et sportive, mais aussi des filières technologiques ou
professionnelles (bâtiment,
électricité, mécanique auto, etc.).
Le recensement montre d’ailleurs que les victimes les plus fortement
exposées sont souvent des enseignants qui
n’étaient pas à ce
moment-là sous statut éducation nationale. Un
phénomène très
fréquent dans les filières où les
professeurs sont aussi des
professionnels.

Il
aura donc fallu attendre plus de dix ans pour ce premier
état des
lieux. Le SNES regrette "une sous-estimation de l’importance
de la question"
par l’administration, ce qui a
entraîné
"retard et inertie". "Notre souci,
explique le SNES, c’est que plein de gens sont partis en
retraite
depuis sept ou huit ans sans avoir eu ce questionnaire."

Et
les élèves ? Leur exposition potentielle, moins
longue que pour les
personnels, "n’est pas de nature à
déclencher une
prévention"
, observe-t-on au ministère.
Cependant,
prévient le docteur Privet, "si on trouve beaucoup
d’atteintes chez des professeurs qui ont
fréquenté tel
établissement, il faudra s’intéresser
à leurs élèves"
.

Benoît
Floc’h