Deux nouveaux décrets récréent Edvige, nouvelle pétition, nouvelle mobilisation
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Les organisations suivantes, membres du Collectif « Non à EDVIGE », ont déposé le 30 novembre deux recours en annulation devant le Conseil d’Etat pour le décret n° 2009-1249 portant création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à la prévention des atteintes à la sécurité publique et le décret n° 2009-1250 portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique.
Il s’agit de :
· 1. Le Syndicat de la Magistrature
· 2. Le Syndicat des Avocats de France
· 3. L’Union Syndicale Solidaires
· 4. La Ligue de l’Enseignement
· 5. La Ligue des Droits de l’Homme
· 6. Le GISTI
· 7. La Fédération Syndicale Unitaire
· 8. La Confédération Générale du Travail
· 9. La Confédération Française Démocratique du Travail
· 10. L’association IRIS
· 11. L’association INTER-LGBT
· 12. L’association AIDES
Le MRAP a décidé de se joindre à ce recours par une intervention volontaire.
En effet, si le Collectif « Non à EDVIGE » constate que la mobilisation sans précédent contre le premier décret « EDVIGE » a permis la disparition des données sensibles se rapportant à la vie sexuelle et à l’état de santé et la limitation de certains délais de conservation des données et une meilleure traçabilité de l’accès à ces données, il constate aussi que bon nombre de ses précédentes critiques s’appliquent toujours aux nouveaux décrets.
Ainsi, comme avec le fichier « EDVIGE », pour ce qui concerne les atteintes à la sécurité publique, il s’agit de ficher des personnes avant même tout passage à l’acte, au mépris du principe de la présomption d’innocence. Comme avec le fichier « EDVIGE », les mineurs pourront être fichés dès 13 ans. Comme avec le fichier « EDVIGE », et de manière plus inquiétante encore, les personnes pourront être fichées à partir du simple fait qu’elles habitent une certaine zone géographique, ou qu’elles en proviennent. Comme avec le fichier « EDVIGE », on constate un mélange des finalités puisque, pour les enquêtes administratives, les agents pourront accéder à des données qui ne devraient relever que de la seule prévention des atteintes à la sécurité publique. Pire qu’avec le fichier « EDVIGE », l’appartenance syndicale, mais aussi les opinions politiques, religieuses ou philosophiques pourront justifier en elles-mêmes qu’une personne ne puisse pas accéder à certains emplois, ce qui limite gravement l’exercice de droits constitutionnels démocratiques.
Parallèlement aux recours, a été mise en ligne le 30 novembre dernier, à l’adresse http://nonaedvige.sgdg.org/ une pétition demandant :
· le retrait des deux décrets du 18 octobre 2009
· la soumission au débat parlementaire de toute nouvelle création de fichier de police.
· l’abandon du fichage des mineurs dans tout fichier fondé sur la seule présomption.
· l’abandon du fichage de l’origine ethnique, même déguisée sous une autre appellation.
· la préservation des droits syndicaux et politiques, de la liberté de pensée et d’expression, y compris pour les personnes exerçant dans un cadre professionnel « sensible ».
A l’heure où ces lignes sont écrites, la pétition a déjà recueilli plus de 8 000 signatures.
Le Collectif « Non à EDVIGE » appelle donc les citoyens et les organisations à se remobiliser, à manifester leur volonté de voir le débat démocratique reprendre la main sur la mise en place de tout nouveau fichier de police et à soutenir ces actions en signant cette pétition et en la diffusant largement.
Commentaires généraux sur les deux nouveaux décrets « EDVIGE »
EDVIGE revient divisé en un fichier pour les enquêtes administratives et un fichier de renseignement policier pour « prévenir les atteintes à la sécurité publique ». Les finalités (administrative et sécuritaire) font donc l’objet de deux textes différenciés, en réponse à la contestation du mélange de finalités dans le précédent décret EDVIGE retiré.
Les deux nouveaux fichiers font néanmoins système, notamment par la disposition, dans l’article 6 du décret sur la « prévention des atteintes à la sécurité publique », que l’accès au fichier ainsi créé est autorisé « y compris pour des enquêtes administratives ».
On note toutefois quelques avancées très partielles, obtenues grâce à la précédente mobilisation citoyenne :
– les données relatives à la santé et à la vie sexuelle ne sont plus enregistrées
– la consultation des données est mieux encadrée et fait elle-même l’objet d’un enregistrement pour sa traçabilité, mais les droits d’accès et de rectification de son propre dossier resteront encore difficiles même pour le fichier d’enquêtes administratives, étant donné que les demandes devront toujours passer par la CNIL qui ne dispose pas des moyens suffisants pour y répondre.
– La durée de conservation des données dans le fichier d’enquêtes administratives est fixe, courant à partir de la date de l’enregistrement – La durée de conservation des données dans le fichier « prévention des atteintes à la sécurité publique » est limitée, et raccourcie pour les mineurs, mais dans tous les cas
cette durée est reconduite à chaque enregistrement : elle est donc en réalité potentiellement illimitée. On ne saurait donc parler d’un quelconque « droit à l’oubli » en l’occurrence.
Il reste que de nombreuses dispositions du premier décret EDVIGE sont reprises dans chacun des deux décrets, et demeurent tout aussi contestables, comme le montre l’analyse détaillée de chaque décret.
De plus, la question de la création de ces deux fichiers par la voie réglementaire se pose toujours, alors que les décrets autorisent la collecte de d’un grand nombre de données, y compris de données sensibles par dérogation à l’article 8-I de la loi informatique et libertés, alors même que les décrets n’apportent pas les garanties nécessaires à la sauvegarde des libertés publiques.