C’est en catimini, par l’intermédiaire d’un cavalier parlementaire, l’amendement 730 au projet de contre réforme des retraites que les députés viennent en douce de faire disparaître la médecine du travail !
signer la pétition "Non à la mort de l’authentique médecine du travail"
Comment dans ce pays fonctionne la démocratie et la presse ? Woerth réussira t il à supprimer la médecine du travail dans un silence général entre deux visites rétribuées chez Mme Bettencourt ?
Gérard Filoche, inspecteur du travail
Amendement 730 UMP a la loi contre les retraites :
Abrogation de l’article L.4622-2 qui stipule que : « Les services de santé au travail sont assurés par un ou plusieurs médecins qui prennent le nom de «médecins du travail» ;
Abrogation de l’article L 4622-4 qui note que : « les services de santé au travail font appel soit aux compétences des CRAM […] soit à des personnes ou organismes […] Cet appel aux compétences est réalisé dans des conditions garantissant les règles d’indépendance des professions médicales et l’indépendance des personnes ou organismes associés».
Non à l’amendement 730 qui abroge la médecine du travail dans la loi sur les retraites
A la veille de l’ouverture du débat sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le gouvernement, sur indication de l’ Élysée, a déposé plusieurs amendements de dernière heure.
Le texte n° 730 introduit l’essentiel de la partie législative de la réforme de la médecine du travail, préparée par le ministre du travail. L’argumentaire du gouvernement pour justifier cette entrée en catimini de dispositions sans rapport avec le sujet est faux. « La mise en œuvre des dispositions législatives relatives à la pénibilité fait jouer un rôle important, de fait, aux services de santé au travail ». Pourquoi ? Faut-il rappeler au ministre du travail que ce sont les médecins conseils de sécurité sociale qui attribuent les IP, et non les médecins du travail ? L’argumentaire considère nécessaire « que les missions de ces services de santé au travail soient clairement définies par la loi ». Il estime que « Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisque le code du travail reste centré sur les missions et l’action du médecin du travail » Faudrait-il acheter un code du travail à Monsieur Wœrth ?
Feinte ignorance, car le rédacteur, au fait du sujet, nous ressert les dispositions que le Medef, il y a un an, voulait faire signer par les organisations syndicales qui les ont repoussées à l’unanimité.
La plus importante et la plus grave est constituée par l’abrogation de deux articles fondamentaux du code du travail :
Abrogation de l’article L.4622-2 qui stipule que : « Les services de santé au travail sont assurés par un ou plusieurs médecins qui prennent le nom de « médecins du travail » » ;
Abrogation de l’article L 4622-4 qui note que : « les services de santé au travail font appel soit aux compétences des CRAM […] soit à des personnes ou organismes […] Cet appel aux compétences est réalisé dans des conditions garantissant les règles d’indépendance des professions médicales et l’indépendance des personnes ou organismes associés ».
Ces abrogations sont indispensables pour justifier l’amendement 730.
En effet, il a pour objet exclusif de transférer aux services de santé au travail, donc à leurs directeurs, nommés et choisis par les employeurs, les responsabilités légales actuelles dévolues aux médecins du travail : «°conduire des actions de santé au travail visant à préserver la santé physique et mentale des travailleurs […] les maintenir dans l’emploi. […] conseiller […] les employeurs, les travailleurs et leurs représentants […] afin d’éviter ou de diminuer les risques professionnels et d’améliorer les conditions de travail. […] assurer la surveillance de l’état de santé des travailleurs en fonction des risques concernant leur sécurité et leur santé au travail. […] participer au suivi des expositions professionnelles et à la veille sanitaire. ».
Si cet amendement, qui prévoit l’application par décret de ces dispositions, est adopté, ce ne seront plus les médecins du travail qui seront chargés de la prévention médicale des risques professionnels, mais les employeurs responsables de l’organisation du travail et des risques qu’il font encourir à la santé des travailleurs qu’ils salarient.
Si à l’occasion du débat sur les retraites, cette manœuvre de pure opportunité permettait de voter l’amendement 730, les assemblées prendraient la responsabilité d’avoir, par une décision de couloir, voire de comptoir, non seulement abrogé la médecine du travail, mais également confié la santé au travail des salariés à leur propres employeurs.
L’importance du sujet mérite un traitement de haute tenue, et non une telle manipulation. Elle ne serait pas digne du rôle des représentants de la nation, chargés d’élaborer les lois. C’est pourquoi, nous demandons à tous les élus, quelles que puissent être leurs positions sur la médecine du travail, de renoncer au vote de cet amendement. Ils permettront ainsi qu’un réel débat sur l’avenir de la prévention des risques professionnels puisse se tenir dans les assemblées. Ce débat pourra, éventuellement, déboucher sur l’adoption de nouveaux textes. Ils auront alors une légitimité que l’amendement 730 ne peut espérer.
Gérard Filoche, inspecteur du travail
Vers une suppression en catimini de l’indépendance de la médecine au travail
Communique de presse de l’Andeva et la Fnath, Paris, le 14 septembre 2010
Imaginez les médecins du travail de France Télécom, EdF ou encore Renault, entièrement contrôlés par les chefs d’entreprise. La prévention des risques professionnels, notamment celle des fameux risques psychosociaux, prendrait l’option « Circulez, il n’y a rien à voir ! » « Des suicides chez nous ? Aucun rapport avec les conditions de travail ou le stress, que des malheureux avec des problèmes personnels… Vous pouvez d’ailleurs vérifier auprès de notre médecin du travail ».
Confier les clés du poulailler au renard, c’est pourtant ce que s’apprête à faire discrètement le gouvernement avec la médecine du travail, dans un amendement n° 730 qui sera examiné aujourd’hui ou demain par l’Assemblée nationale, dans le cadre du volet pénibilité de la r
33;forme des retraites.
A la surprise générale, ce texte prévoit que, désormais, « les missions du médecin du travail sont exercées sous l’autorité de l’employeur », lequel doit également désigner « la ou les personnes compétentes dans l’entreprise pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise ». Et comme si cela ne suffisait pas, la mission précise dévolue au médecin du travail, d’éviter toute altération de la santé, disparaît au profit d’une mission plus générale confiée au service de santé au travail, dirigé par un représentant des employeurs.
Ainsi donc, le salarié remettrait entièrement sa santé entre les mains de son patron. Le gouvernement n’a tiré aucune leçon de l’affaire de l’amiante et s’apprête à supprimer l’un des contre-pouvoirs qui pouvait, dans l’entreprise, faire valoir des arguments médicaux et de santé publique pour éviter l’altération de la santé des salariés, du fait de mauvaises conditions de travail.
L’ANDEVA et la FNATH, association des accidentés de la vie, dénoncent ce projet et appellent au rejet d’une réforme de la médecine du travail totalement à contre courant des conclusions des nombreux rapports qui, ces dernières années, ont recommandé au contraire un renforcement de l’indépendance des services de santé au travail, voire l’abandon de sa gestion par les seuls employeurs.
Dernièrement, en juin, c’est le Conseil national de l’ordre des médecins qui, de façon prémonitoire, a rappelé au ministère du Travail que l’indépendance des médecins du travail ne devait pas « être altérée par de nouvelles règles de gouvernance des services de santé au travail ». A l’évidence, le gouvernement a décidé de s’asseoir sur les règles de déontologie médicale et souhaite une médecine du travail aux ordres du monde économique. Le Medef ne pouvait pas rêver mieux !
De plus, cet amendement représente un véritable passage en force d’une réforme qui devait être négociée avec les partenaires sociaux.
L’ANDEVA et la FNATH appellent donc tous les parlementaires, députés et sénateurs, de la majorité comme de l’opposition, à bien mesurer les conséquences sanitaires de cet amendement s’il venait à être adopté mais aussi la responsabilité directe qu’ils porteraient quant à la santé des travailleurs.
Non à la mort de l’authentique médecine du travail
signer la pétition
De l’urgence de la mise en place d’une vraie réforme de la prévention en santé au travail dans l’intérêt exclusif de la santé des salariés
Appel de 1100 médecins, inspecteurs contrôleurs du travail et acteurs de santé au travail, de nombreuses personnalités et déjà près de 20000 signataires
A l’heure de la sous déclaration massive des accidents du travail, de l’augmentation des maladies professionnelles et des suicides au travail (comme cela a été révélé à France Télécom) à l’heure de la hausse des accidents cardiaques et vasculaires liés au stress et à la souffrance au travail, à l’heure où dérivent les méthodes de management et leurs exigences dévorantes de productivité, faut-il affaiblir ou renforcer la médecine du travail ?
Après plus de vingt ans de dégradation continue de la santé au travail, nul ne nie qu’il y ait besoin d’une grande réforme pour la reconstruire. Mais les salariés, les syndicats, les professionnels des questions de santé au travail sont terriblement inquiétés par les orientations de la « réforme » annoncée de M. Darcos.
C’est un projet qui va dans le sens de celui du Medef auquel, pourtant, tous les syndicats de salariés se sont opposés unanimement en 2009. Il propose carrément de violer le cadre de responsabilité du médecin du travail pour qu’il serve de bouclier protecteur à celui des employeurs. Il est en contradiction de manière rédhibitoire avec les principes du Code de Déontologie médicale inscrits dans la Loi. Il projette d’organiser les prochains services de santé au travail (SST) en donnant total pouvoir au patronat : seront juges et parties ceux-là mêmes qui créent les risques.
Plus que jamais les médecins du travail et les autres acteurs des SST seront cantonnés dans des activités éloignées de la défense de la santé des travailleurs. Il s’agit de la mort de toute réelle prévention en santé au travail. Il s’agit de « démédicaliser » la seule spécialité dont l’objet est le lien entre la santé et le travail.
Il s’agit de prendre prétexte de la pénurie (réversible) de médecins du travail en les remplaçant par des infirmiers alors que ceux-ci ne peuvent pas se substituer aux médecins et qu’ils n’ont pas de statut protégé. Il s’agit de transférer ces missions aux directeurs des services interentreprises de santé au travail (SST) c’est-à-dire aux Conseils d’Administration composés majoritairement d’employeurs (2/3). Il s’agit de déposséder les « commissions de contrôle » de leurs prérogatives notamment en ce qui concerne le droit d’opposition à la mutation ou au licenciement des médecins du travail, alors qu’au contraire ce droit d’opposition devrait être étendu pour que tout « Intervenant en Prévention des Risques Professionnels » bénéficie d’un statut de « salarié protégé ». Comment une « prévention » peut-elle exister, sans entretien clinique régulier avec les salariés, en espaçant les visites tous les 3 ans ? L’aptitude et l’inaptitude seraient définies du point de vue patronal : actuellement ces notions n’ont pas de définition légale, le médecin du travail les apprécie au cas par cas selon les risques pour la santé liés au poste de travail. Une nouvelle définition écrite dépendrait exclusivement de la capacité du salarié à effectuer la totalité des tâches prescrites : elle aurait une "simplicité" radicale, binaire (apte ou inapte) et reviendrait à supprimer toute notion d’aménagement de poste et d’adaptation des tâches à l’homme.
Le Medef voulait aussi que le médecin-conseil puisse déclencher une procédure obligatoire de retour au travail pendant l’arrêt de travail. L’employeur serait libéré de ses obligations de reclassement dès la visite de reprise. Après cette visite unique, et dans un délai de 21 jours, le salarié déclaré inapte pourrait être licencié. Les voies de recours, aujourd’hui possibles auprès de l’inspection du travail, seraient renvoy&
#233;es à des dispositions non précisées. Le projet de X. Darcos reprend les mêmes intentions, très dangereuses pour les salariés victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Au contraire de tout cela, une véritable prévention en santé au travail est nécessaire et possible.
L’indépendance professionnelle exige que les préventeurs soient à l’abri des pressions de ceux qui les paient. Avec le mode de production en flux tendu et la recherche effrénée de gain de productivité, les conditions de travail se dégradent partout, tous les secteurs sont « à risques », bureaux comme ateliers. Une authentique médecine de prévention, en adéquation avec les constats sur le terrain, peut tirer sa grande pertinence de l’entretien clinique régulier des salariés avec le médecin du travail. Il faut que la médecine du travail authentique et spécifique soit un véritable service public indépendant, avec les moyens nécessaires, la formation, les effectifs, et la prévention apparaîtra redoutablement efficace, progressive et finalement « économique » dans l’intérêt des salariés.
Que tous les acteurs de progrès refusent ensemble le projet gouvernemental de mise à mort de la médecine du travail POUR une authentique médecine du travail, indépendante, dans l’intérêt exclusif de la santé des salariés !