John Maïna, un jeune kenyan de 19 ans s’est pendu vendredi 15 février dans l’appartement où il était logé par France Terre d’asile à Meudon. Il venait d’apprendre le rejet définitif de sa demande d’asile et, comme il l’explique dans une lettre, il refusait d’être expulsé au Kenya qu’il avait fui il y a deux ans, condamné à mort. Il a préféré mourir plutôt que de rentrer dans un pays en proie à la guerre civile.

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john maina

Prise de parole lors du rassemblement à la mémoire de John Maïna le 23 février 2008

En mémoire de John Maina

Nous sommes réunis ici, membres de Championnet Sports et gens d’horizons divers, en mémoire de John Maina, un jeune homme plein de vie et d’espérance qui en est arrivé à se donner la mort. John avait 20 ans, il était de nationalité kenyane, il vivait en France depuis avril 2006 et était demandeur d’un droit d’asile. Le vendredi 15 février, dans l’après-midi, John s’est pendu dans l’appartement qu’il occupait à Meudon, en banlieue parisienne. Il venait d’être débouté de sa demande par la Cour nationale du droit d’asile. Il ne l’a pas supporté, comme il l’a clairement expliqué dans une lettre retrouvée auprès de son corps. Il s’est suicidé pour ne pas être renvoyé dans son pays d’origine, le Kenya.

Nous n’avons pas voulu que John Maina reste un simple fait divers dans les journaux. Pour nous qui l’avons côtoyé pendant près de deux ans, John était un sourire, une force, un être plein de gentillesse, de courage et d’humilité, un camarade, un ami et un souffle inépuisable. Car John Maina, comme beaucoup de Kenyans, était un coureur à pied de grand talent, un jeune athlète plein de promesses, notre coéquipier au sein de la section Athlétisme de Championnet Sports. Il s’entraînait plusieurs fois par semaine à nos côtés et portait nos couleurs dans les compétitions. Nous sommes tous aujourd’hui sous le choc, profondément émus, bouleversés et pour le dire franchement révoltés par la fin tragique et brutale de John. Nous avons tous cru que les lois de la République avaient pour but de protéger les citoyens et les gens qui vivent sur le sol français. Nous savons aujourd’hui que des lois de notre pays peuvent pousser des êtres humains à un tel degré de désespoir, qu’ils ne voient d’autre issue que de se donner la mort.

Que peuvent peser tous les principes de la loi républicaine devant la mort d’un jeune homme de 20 ans, qui avait choisi, avec un courage et une force de caractère que l’on ne peut imaginer, de quitter son pays, ses racines, sa famille, ses amis à l’âge de 18 ans ? Un jeune homme qui s’était parfaitement intégré dans notre pays grâce à sa passion, la course à pied. Et qui avait porté ses espoirs dans la France et ses traditions universelles de terre d’accueil.

John Maina se disait en danger s’il devait retourner au Kenya. Comment aurions-nous pu imaginer qu’il était encore plus en danger dans notre propre pays ? Sa mort nous amène également à réfléchir, en tant que membres d’une association, citoyens français, et en tant qu’humains, sur notre part de responsabilité. Qu’avons-nous fait, ou pas fait, pour qu’un jeune homme de 20 ans, dans la force de l’enthousiasme de l’âge, souriant, discret, motivé, avec qui nous courrions plusieurs fois par semaine, ait été acculé à accomplir un tel acte ? Quel est le sens de notre devise : Liberté, Egalité et plus encore Fraternité ? Nous n’avons pas de réponse à notre niveau. Mais nous voulons comprendre et c’est pourquoi nous avons interpellé les plus hautes autorités de ce pays.

Nous ne voulons pas qu’on oublie John, notre ami. Nous ne voulons pas qu’il soit mort pour rien. A l’heure où on parle d’honorer la mémoire des morts, pensons aussi aux vivants.

Au nom de la section Athlétisme de Championnet Sports et de son président Gérard Gaudin, nous remercions très chaleureusement tous ceux qui se sont joints à nous aujourd’hui pour rendre hommage à John et qui nous ont aidé dans nos actions et démarches.

Pour reprendre la belle image de l’un d’entre nous : "Et maintenant, John court parmi les étoiles". Cela nous réconforte mais ne nous console pas.

Merci à tous !