Le gouvernement avait promis une réforme des retraites « basée sur l’équité », mais ce qu’il a présenté ne répond pas à sa promesse et poursuit la logique des réformes passées. Les mesures en direction des femmes sont très marginales alors que les inégalités de pension entre les sexes sont importantes : la pension de droit direct des femmes est inférieure en moyenne de 42 % à celle des hommes, leur pension globale de 28 %.
Les femmes ont en moyenne des carrières plus courtes que les hommes ; elles partent plus tard à la retraite (1,4 an plus tard pour les personnes parties en 2008) ; elles sont plus souvent concernées par la décote et bénéficient beaucoup moins de dispositifs comme la surcote ou la retraite anticipée pour carrières longues.
Si la mesure qui permet une meilleure validation de trimestres pour les petits temps partiels est bienvenue, elle ne concerne que les personnes au SMIC qui ont un emploi à temps partiel de moins de 15 heures par semaine, ce qui représente au maximum 2,6 % de l’ensemble des salarié-es.
La mesure qui permet de mieux prendre en compte la maternité dans le dispositif de retraite anticipée pour carrière longue ne fait que corriger – à peine – l’injustice du décret pris par… ce même gouvernement en 2012. Elle ne modifiera qu’à la marge l’accès des femmes à la retraite anticipée, dont les bénéficiaires sont à 79 % des hommes.
Enfin, la refonte annoncée depuis plusieurs mois de la majoration de 10 % pour trois enfants relève de l’entourloupe : elle est renvoyée au-delà de 2020, par contre, ce qui est décidé dès 2014, c’est… sa fiscalisation ! Même les retraité-es de revenus modestes verront leur revenu net baisser.
Pourtant, il serait juste de modifier cette majoration qui, étant proportionnelle à la pension, profite essentiellement aux hommes puisqu’ils ont des pensions plus élevées, alors que ce sont majoritairement les femmes qui sont pénalisées dans leur carrière par la prise en charge des enfants.
Au final, ces mesures ne permettront pas de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes. Il est notable d’ailleurs que le chiffrage officiel des mesures cumulées pour les jeunes, les femmes, les carrières heurtées et les petites pensions fasse apparaître un coût nul jusqu’en 2030 !
Le gouvernement fait le choix de continuer à augmenter la durée de cotisation nécessaire pour une pension sans décote, alors que cette mesure se traduit, en pratique, par une baisse de la pension pour le plus grand nombre. Elle touche plus durement les femmes du fait des carrières plus courtes et les jeunes car ils accèdent de plus en plus tard à un emploi stable.
Une autre orientation est possible et nécessaire. Elle suppose d’en finir avec l’austérité, de relancer l’emploi par une réduction du temps de travail, une politique audacieuse d’investissement en matière sociale et écologique et une meilleure répartition des richesses.
Le renforcement des droits directs à pension des femmes est une priorité. Il passe notamment par une meilleure prise en compte du temps partiel. Cette forme d’emploi est souvent imposée par l’employeur pour qui elle est bénéfique : il serait légitime d’instaurer une surcotisation patronale sur le temps partiel, qui permettrait ensuite un meilleur niveau de pension.
Le minimum contributif devrait être sensiblement augmenté, la légère revalorisation du plafond qui a été annoncée étant très insuffisante. Il faut non seulement en finir avec l’allongement régulier de la durée de cotisation mais aussi faire en sorte que la durée demandée soit réalisable par l’ensemble des salarié-es. La décote doit en outre être supprimée.
Il faut agir en parallèle sur les inégalités professionnelles, en amont donc de la retraite. La réalisation de l’égalité entre les femmes et les hommes en ce qui concerne les taux d’activité et les salaires améliorerait très fortement les recettes des caisses de retraite ainsi que le droit des femmes à une pension.
Cela suppose de lutter contre les discriminations salariales, mener des politiques pour inciter les pères à s’investir dans la prise en charge des enfants, créer un service public de la petite enfance accessible à tou-te-s et à un coût abordable, afin d’éviter aux femmes d’interrompre leur travail à l’arrivée des enfants.
Le projet de réforme qui a été présenté est décidément très loin du compte. Nous appelons les femmes et les hommes de toutes générations à manifester le 10 septembre pour défendre l’égalité des droits.
Premières signataires :
Geneviève Azam, porte-parole d’Attac ; Ana Azaria, présidente de Femmes égalité ; Annick Coupé, porte-parole de Solidaires ; Sophie Binet, bureau confédéral de la CGT ; Solange Cidreira, Féministes pour une autre Europe ; Monique Dental, présidente du Collectif féministe Ruptures ; Maryse Dumas, membre du CESE ; Anne Feray secrétaire nationale de la FSU, Clémence Helfter, Osez le féminisme ! Cécile Gondard-Lalanne, secrétaire nationale de Solidaires ; Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU ; Esther Jeffers, Économistes atterrés ; Gaïa Laussaube, porte-parole des efFRONTé-e-s ; Julie Mandelbaum, secrétaire générale de l’UNEF ; Marie-Pierre Martinet, Secrétaire générale du Planning familial ; Christiane Marty, Fondation Copernic ; Julie Muret, porte-parole d’Osez le féminisme ! ; Muriel Naessens, Féminisme-Enjeux ; Martine Noël, Cadac ; Marie-Josée Pépin, collectif Tenon ; Suzy Rotjman, porte-parole du CNDF, Sabine Salmon, présidente de Femmes Solidaires ; Maya Surduts, porte-parole du CNDF ; Céline Verzeletti, bureau confédéral de la CGT