Fin juillet, le Premier Ministre, en présence de représentants des douze principaux ministères, a donné son accord pour procéder à deux expérimentations prolongeant directement l’un des pans de la révision générale des politiques publiques (RGPP).
La méthode est contraire au dialogue social. Elle n’a jamais fait l’objet de concertation. L’information a été distillée par la presse début septembre par publication d’un « bleu » de Matignon. Ce nouveau volet de la réforme territoriale de l’Etat (RéATE) révèle une forme de double langage sur l’arrêt ou la poursuite de la RGPP. Ce projet gouvernemental est directement destiné à supprimer de nouveaux emplois. il revient à couper dans les faits les relations entre les échelons départementaux et leurs ministères.
La première mesure consiste à généraliser la mutualisation des fonctions support (gestion matérielle et des emplois) des directions départementales interministérielles en les regroupant au sein des préfectures. Cela s’inscrit dans la continuité des pratiques du précédent gouvernement. Cette mesure aura concrètement pour conséquence de faciliter la suppression d’emplois, de rendre le ministère de l’Intérieur pilote de la gestion des politiques publiques d’autres ministères.
La seconde mesure va encore plus loin en expérimentant dans une région, le regroupement de tous les emplois dans un programme budgétaire unique géré par la Préfecture. Ce phénomène induit une coupure dans la gestion des carrières des personnels qui ne dépendront plus de leur ministère d’origine mais seront désormais affectés au ministère de l’Intérieur. Elle aura pour effet immédiat de transformer les services départementaux en bureaux annexes des préfectures. Cette réduction des services de l’Etat doit être appréciée dans le contexte du nouvel acte de décentralisation qui se prépare.
Matignon veut aller vite et en catimini, pour rendre officielle sa décision avant fin septembre.
La FSU en appelle une fois de plus à la nécessité d’un arrêt de la RGPP sous tous ses aspects, donc de son volet RéATE. La FSU demande qu’il soit mis fin réellement à des pratiques et orientations provoquant autant la destruction des missions de service public que la souffrance des personnels. Ces expérimentations ne doivent pas être menées mais au contraire remplacées par des mesures assurant des services publics de proximité à tous les niveaux et la continuité de l’action ministérielle à tous les échelons.
La FSU a dénoncé la méthode et le contenu des expérimentations auprès de Marylise Lebranchu en charge de la Fonction Publique et de la réforme de l’Etat. La ministre s’est engagée à écrire à chacune des organisations pour préciser ses intentions. La FSU sera attentive et vigilante à la réponse apportée par la Ministre quand aux suites qu’elle compte donner à ces expérimentations.
Et aussi, un article d’Acteurs publics.
Le gouvernement voit des "doublons" dans les préfectures
Dans un document qu’Acteurs publics s’est procuré, Matignon propose d’expérimenter des regroupements de personnels entre les préfectures et directions départementales interministérielles de deux régions. Les syndicats, qui rencontraient le 4 septembre la ministre de la Réforme de l’État Marylise Lebranchu, y voient un moyen de réduire les effectifs dans les ministères dits "non prioritaires".
Les préfectures et les directions départementales des ministères vont-elles subir des coupes pour compenser les postes créés sur cinq ans dans l’Éducation nationale, la police et la justice ? A lire un « bleu » diffusé le 23 août [cliquez ici pour le lire] qu’Acteurs publics s’est procuré, cela pourrait être une piste du gouvernement pour résoudre la difficile équation budgétaire à laquelle il est confronté, même si cela ne concernerait sans doute pas le budget 2013.
Le 27 juillet, lors d’une réunion qui rassemblait des hauts fonctionnaires de Matignon et de douze des principaux ministères (Finances, Affaires sociales, Égalité des territoires, Intérieur, Écologie, etc.), le cabinet du Premier ministre a en effet donné son feu vert au lancement d’ici la fin de l’année d’expérimentations dans les préfectures et les directions départementales interministérielles (DDI) de deux régions.
Expérimentation en Midi-Pyrénées
La première consiste à mutualiser les équipes chargées des fonctions support des directions départementales interministérielles avec celles des préfectures. En clair, il s’agit de favoriser les regroupements entre les services "fonctionnels" – ressources humaines, informatique, immobilier, gestion, etc. – des préfectures et des services départementaux. La deuxième vise à rassembler tous les emplois des DDI et des préfectures dans une même enveloppe budgétaire, alors que chaque ministère a aujourd’hui la main sur les crédits correspondants à ses fonctionnaires. Selon nos informations, cette seconde expérimentation aurait lieu en Midi-Pyrénées et rechercherait aussi les mutualisations entre services.
Afin de préparer le terrain, une mission composée d’inspecteurs des finances et de membres du corps d’inspection du ministère de l’Intérieur (IGA) a été nommée. Le ministère de la Réforme de l’État s’appuiera sur leurs conclusions pour définir un cahier des charges précis des expérimentations, avant un ultime arbitrage de Matignon fin septembre. Le 27 juillet, certains des hauts fonctionnaires participant à la réunion ont insisté sur l’importance de préserver l’organisation récente de l’administration de l’État et de réduire les écarts de primes entre les fonctionnaires des différents ministères.
"Préparée en catimini"
"Le cabinet du Premier ministre confirme que l’organisation interministérielle de l’administration départementale de l’État n’est pas remise en cause et qu’il convient de la conforter en lui donnant les moyens de mieux fonctionner", relève le compte-rendu de la réunion du 27 juillet. Pas sûr néanmoins que ces quelques lignes rassurent les organisations syndicales qui s’alarment déjà de l’ampleur des suppressions de postes imposées aux ministères non prioritaires (- 2,5 % par an jusqu’en 2015) et qui rencontraient le 4 septembre la ministre de la Réforme de l’État Marylise Lebranchu pour la présentation de l’agenda social.
La fédération générale des fonctionnaires Force ouvrière a réagi vivement au projet de mutualisation du gouvernement. Le syndicat dénonce l’absence de concertation autour d’une expérimentation "préparée en catimini par les services du Premier ministre et quelques hauts fonctionnaires" et regrette "une interministérialité forcenée qui va provoquer la suppression de corps particuliers de fonctionnaires". FO ajoute que "si le gouvernement affirme que la RGPP est stoppée, elle ne doit pas continuer d’avancer masquée sous la forme d’expérimentations". Les négociations s’annoncent musclées.