Refuser de faire mal.
Les métiers de l’humain dans les services publics subissent tous les mêmes conséquences de gestion qui entretiennent des pénuries, en déprise avec les besoins réels.
Comment ne pas penser à ces infirmièr-e-s, aide-soignant-es, travailleur-ses sociaux-ales, médecins, qui s’expriment régulièrement, sur tous les tons, dans les médias, syndicalement, face aux employeurs, pour dire combien, malgré tout leur engagement, ils et elles ont le sentiment de maltraiter les patient-es qu’ils ont à cœur de soigner ou d’aider. Ils et elles éprouvent ce sentiment violent de faire mal faute de moyens en postes, matériels, formation, suffisants. Ils et elles éprouvent un épuisement physique, moral, d’autant plus grand qu’ils et elles conçoivent le mal-être des personnes âgées, malades, enfants, dont ils et elles ont la charge.
Appuyées sur un discours faux de pragmatisme économique, ces gestions de pénurie sont en fait le fruit d’une pensée très idéologique : le choix de remettre en marché ce que l’histoire a permis de socialiser, sur des valeurs de solidarité, de partage, de protection collective à savoir la santé, l’éducation, la protection sociale (maladie, chômage, dépendance, retraite…).
Cette grève du 7 juin s’inscrit dans cette lignée des refus de continuer à faire en sachant qu’on fait mal son métier, et qu’on fait mal aux enfants porteur-ses de handicap dont on a la responsabilité, aux familles qui nous les confient.
Les coordonnateur-trices s’ULIS disent « STOP », et avec elles et eux le monde enseignant dans leur ensemble qui portent et qui font vivre un service public ambitieux, central
Le 7 juin, je serai en grève, contre l’école désinclusive imposée notamment depuis 5 ans.
La situation de l’École publique n’est plus tenable.
L’école et ses personnels implosent sous le poids des injonctions paradoxales, face au manque intenable de moyens et aux discours irréels de la hiérarchie.
Dans le même temps, la loi prévoit, et nous y sommes favorables, que tous·tes les élèves puissent être scolarisé·es dans leur école/établissement.
Le changement de paradigme s’est opéré avec le passage de l’intégration à l’inclusion. C’est un progrès pour l’ensemble de la communauté éducative que chacun·e ait, de droit sa place au sein du système scolaire.
Mais, pour que ce droit soit effectif, il faut y consacrer des moyens.
Or, sans moyens, on fait quand même, mais on fait mal dans tous les sens du terme.
- On fait mal, car les élèves sont scolarisé·es dans des conditions indignes et contraires à leur droit à l’Éducation. Les conditions d’inclusion dans le 1er et le 2d degré sont trop souvent insatisfaisantes tant pour les élèves que pour les personnels.
- On fait mal, car personnels et élèves sont en grande souffrance à devoir prioriser tel ou telle élève au détriment de tous·tes les autres.
- On fait mal, car l’inclusion des élèves en situation de handicap nécessite des moyens humains à la hauteur des besoins.
- On fait mal, car les AESH qui accompagnent les élèves et les enseignant·es sont elles-mêmes précarisées et méprisées.
- On fait mal, car nos pratiques, imposées par le manque de tout, ne correspondent pas à nos valeurs pour notre métier et pour l’école.
- On fait mal, car l’Éducation Nationale sait parfaitement que tout va de travers, mais le masque par des discours lénifiants sur la bienveillance et la confiance.
Nous ne voulons plus et ne pouvons plus continuer ainsi.
Faire mal et ne rien faire, ce serait cautionner la violence d’une politique que nous n’avons pas choisie et qui nous est imposée, contre notre volonté, contre nos métiers, contre nos élèves et leurs familles, contre notre éthique du métier.
Le 7 juin, nous serons en grève contre la politique anti-éducative imposée depuis 5 ans et qui nous broie, nous et nos élèves.